Maule (Yvelines)
De notre correspondante
S’il nous reçoit dans une maison bien chauffée, entouré de jolis meubles, ce n’est pas pour donner de lui une image rassurante, mais parce que sans le toit maternel, Éloi Verlin serait « vite tombé dans la précarité ». Depuis qu’il a terminé sa formation à Nevers (Nièvre), ce jeune homme mince aux cheveux châtains attachés en queue-de-cheval, a ré-emménagé avec sa maman, dans cette charmante maison du centre-ville. Avec le sentiment de lui offrir une « présence attentive » et d’aborder le quotidien avec moins d’inquiétude.
À 39 ans, en fin de reconversion professionnelle, Éloi reconnaît s’être beaucoup cherché. Mais cette fois, espère-t-il, la voie pourrait se dégager et lui ouvrir les portes d’un emploi pérenne. Bac scientifique en poche, il a d’abord tenté plusieurs formations, de l’orthoptie à l’action commerciale en passant par le génie climatique et le service militaire. Il en a retenu qu’il n’était « pas fait pour l’école », ni pour « la routine ».
« Par hasard », il pousse un jour la porte de la chocolaterie de Maule – petite ville des Yvelines dans laquelle il a grandi – pour un travail saisonnier, qu’il acceptera trois années de suite pour des périodes de trois à six mois. Puis il y décroche un contrat à durée indéterminée, apprend la fabrication du chocolat, assure les livraisons… mais finit par déchanter. « Je n’étais pas du métier et sans diplôme, je n’avais pas d’évolution possible. J’étais gourmand de chocolat, mais pas assez passionné pour durer. » Après dix années de « situation relativement confortable », il change donc radicalement de voie et décroche un CAP de charpentier au terme d’une année de reconversion professionnelle. Pourtant, depuis sa rupture conventionnelle avec la chocolaterie, en juillet 2014, Éloi est demandeur d’emploi.
« J’ai recherché du boulot en charpente dans la région, mais l’intérim ne m’intéressait pas et je n’ai pas trouvé de CDD, ni de CDI. Ça a été dur, je n’en pouvais plus de ne rien faire. » Il suit alors une formation en couverture, « pour se donner plus de chances de trouver du boulot » : Huit mois à Nevers, qui ont pris fin en juin, mais ne lui ont pas permis de trouver un patron.
Pour s’occuper et faire entrer un peu d’argent, il est devenu autoentrepreneur, il assure des petits travaux de toiture et change quelques gouttières. « Ça me permet de tenir, pas de vivre correctement, affirme le jeune homme. Me payer un loyer, ce ne serait pas possible, mais comme je vis avec ma mère, je peux garder un peu d’argent pour avoir une vie sociale, jouer au hand-ball. »
Malgré ces petits contrats, Éloi ne veut pas s’installer dans ce statut d’autoentrepreneur. Il reste décidé à décrocher un poste, et vite si possible, car dans un mois, il ne sera plus indemnisé par Pôle emploi. Il préférerait trouver un CDD « pour être jugé sur pièces avec un salaire fixé, mais aussi conserver une certaine autonomie et pouvoir juger librement de la situation. »
Car Éloi n’est pas prêt à accepter n’importe quoi, ni une mauvaise ambiance, ni d’être sous-payé. « Je ne cherche pas la sécurité à tout prix, mais d’abord un niveau de salaire correct. C’est la fiche de paie qui fait la reconnaissance, estime-t-il. Or, les employeurs demandent des personnes qualifiées mais ils ne veulent pas les payer. Moi, à 1 000 €, je refuse car je sais que je vaux plus. »
Il y a quelques jours, Éloi a passé un entretien. Un poste dans son domaine de la charpente, mais élargi à d’autres fonctions. « Je devrais par exemple gérer aussi le site Internet, précise-t-il. Ça me plaît car je suis capable de m’adapter à toutes les situations sur un chantier. » Si sa candidature est retenue, il signera sans hésiter. Mais si ça ne marche pas, Éloi est décidé à prendre un nouveau départ, après ces deux années de chômage : il partira en Bretagne où les loyers sont moins chers.