Depuis deux mois, les prix s’emballent sur de nombreux métaux, matériaux, produits de construction, et la situation commence à inquiéter les professionnels de la construction. « L’acier a été le premier à s’envoler en décembre 2020, puis nous avons connu une petite alerte sur le verre ; ensuite, tous les métaux non ferreux ont suivi le mouvement », explique la Fédération française du bâtiment (FFB), contactée par Batiactu. Un matériau de construction, et non des moindres, est également touché : le bois d’œuvre, concerné non seulement par des hausses de prix importantes mais aussi des « problèmes d’approvisionnement ». Voire, dans quelques cas, des mises au chômage technique. La Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) vient d’écrire au ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, pour l’avertir de ces évolutions. « Le prix du cuivre a progressé de 27,9% sur un an et de près de 10% sur le seul mois de décembre 2020, quand le prix du zinc a progressé de 22,2% sur un an et de près de 4% au mois de décembre 2020 », peut-on lire dans ce courrier daté du 15 février 2021.
Ne pas bloquer les marchés
Comment les entreprises de construction font-elles face à ces augmentations ? « La seule véritable solution à court terme, c’est de passer ces hausses dans les prix, et d’indexer les marchés », explique la FFB. Sur les opérations déjà engagées, reste la négociation de gré à gré, « au bon vouloir de la maîtrise d’ouvrage ». La FFB a demandé à l’État de faire valoir auprès des acteurs les préconisations en matière d’indexation des marchés, en public comme en privé. La Capeb insiste de son côté sur l’importance d’engager une discussion, en toute transparence, avec les clients particuliers. « Nous essayons de protéger nos artisans de ces hausses massives, tout en ne bloquant pas le marché », explique Jean-Christophe Repon, président de la Capeb, à Batiactu. Ces hausses vont en effet être répercutées sur les prix de sortie ou vont venir rogner les marges des professionnels. « Nous rappelons à nos artisans qu’ils ont tout intérêt à être vigilants sur le libellé de leurs devis, en instaurant par exemple des prix valables un mois, avec une clause de revoyure. Nous devons expliquer à nos clients que les artisans subissent une hausse des coûts à laquelle ils ne peuvent pas faire face tout seuls. » Des fabricants de matériels de chauffage ont d’ores et déjà signalé des augmentations à venir de 5 à 10% de leurs gammes de produits, des reports de livraisons pouvant aller jusqu’à plusieurs semaines : les entreprises de construction doivent donc s’y préparer.
Le marché de la construction pourrait-il être sérieusement ralenti, cette année, du fait de cette hausse des coûts ? Impossible à dire aujourd’hui. « Si les entreprises arrivent à faire passer des prix corrects, cela ne devrait pas jouer beaucoup », estime la FFB. Difficile de savoir combien de temps ces tensions vont perdurer. « Les aciéries européennes redémarrent lentement, espérons que dans quelques mois cela permettra de faire redescendre la température », pose la FFB. Sur le bois, difficile d’effectuer des prévisions, mais « si les contrats passés avec les constructeurs américains [très friands de construction bois, NDLR] sont priorisés durant les six prochains mois, nous pourrions nous retrouver dans une situation de pénurie ».
A l’origine de ces augmentations de coûts, d’après la FFB, le redémarrage post-pandémie des économies asiatiques, qui aspire une large partie des matières premières et des produits semi-finis. « Cela pèse d’autant plus qu’en Europe, dans le cadre des divers confinements, les hauts fourneaux ont réduit leur volume de production. » Quant au bois, l’organisation professionnelle voit dans la situation actuelle une possible conséquence de la taxe décidée par Donald Trump sur les bois canadiens ; ils deviendrait ainsi plus intéressant, pour les acteurs d’outre-Atlantique, de faire importer des bois européens que d’utiliser du canadien.